Le débarquement des marchandises – Les 4 hypothèses

Comme nous l’avons dit au début de cet article pour justifier le choix d’un site, il faut impérativement, selon le droit de l’environnement en étudier plusieurs et démontrer que le projet retenu est le moins impactant pour l’environnement et qu’il est adopté dans l’intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d’autres raisons impératives d’intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique.

Nous sommes partis des trois hypothèses envisagées par le rapport SOGREAH à savoir le Port Clos, la grève de l’église et Goaréva, l’ancien canot de sauvetage. Nous avons rajouté à cette liste le site de la Corderie.
Pour chaque site nous essaierons d’analyser de façon sommaire les éléments intéressants du site mais en détaillant également ses inconvénients.

Nous ne faisons pas de choix ni un véritable rapport mais nous proposons une réflexion qui puisse nourrir un débat.

Nous commencerons par la grève de l’église qui a été beaucoup étudiée, puis le Port Clos qui est le seul port de la liste. Nous envisagerons la Corderie qui est déjà utilisée partiellement pour l’évacuation des déchets et enfin Goaréva qui est le seul site à n’avoir jamais fonctionné.

La grève de l’église

Ce site est utilisé depuis 2014 de façon continue par Bréhat logistique pour la livraison des marchandises fraiches ainsi que les matériaux utilisés par ses sociétés sœurs ou ceux envoyés par des particuliers ou entreprises.
Le seul aménagement actuel, nous l’avons dit, c’est le chemin de roulement construit en 1996.
Une des premières qualités de ce lieu est de permettent aux marchandises fraiches d’être débarquées au plus près de leur lieu de livraison. Pour autant il faut aussi préciser que les chemins qui mènent à la grève de l’église sont exigus et peu pratiques.

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Le chemin de roulement et son accès vu du bourg (en haut) et vu de la grève (en bas)

En matière d’environnement, la partie terrestre du site est classée, dans le futur PLU, en zones remarquables.

Cependant le caractère de site naturel déjà en partie aménagé est renforcé par la présence des installations de la station d’épuration (STEP) qui est une installation, classée pour la protection de l’environnement catégorie prévue par le code de l’environnement. Cette STEP est astreinte à toute une série de normes de rejets des eaux dans le milieu naturel.

Son fonctionnement donne un argument de poids à ceux qui défendent l’intérêt ce site dans la mesure où les installations portuaires n’aggraveront probablement pas les pollutions déjà occasionnées légalement par la STEP.
C’est un point qui ne doit pas être négligé.

Pour autant, dans son étude, le CEREMA est extrêmement prudent en indiquant clairement que :
la présente « étude de faisabilité technique proposée dans le chapitre suivant ne préjuge pas des diverses demandes d’autorisations nécessaires pour porter ce projet et encore moins de l’issue finale des procédures. Elle ne saurait constituer une pré-validation de la recevabilité du projet par les services de l’État. »

Il rappelle, comme nous l’avons déjà dit que :
« La dimension d’opportunité de ce projet, non encore explorée, nous paraît notamment devoir être abordée de la manière la plus circonstanciée possible, s’agissant d’aménagements susceptibles d’avoir une incidence directe ·sur les milieux terrestres et marins. » et souligne : « cette nécessité d’explorer la dimension d’opportunité est d’autant plus cruciale que le territoire de l’île de Bréhat revêt une importance écologique et patrimoniale majeure ».

D’ailleurs des études, certes assez anciennes, ont été réalisées et qui pronostiquent que la construction d’installations dans ce site aurait pour conséquence, à moyen terme, son envasement. C’est un phénomène qui a été constaté suite à la construction du chemin de roulement.
Ainsi la grève de l’église, quoi qu’on en dise, est un site très sensible en termes d’environnement. C’est également un site soumis aux marées ce qui entraine des contraintes pour le débarquement des marchandises. Pour ce site le CEREMA a fait une étude de faisabilité pour des installations permettant le débarquement des marchandises. Comme le précise ce rapport, la commune de l’île de Bréhat envisage d’aménager un site dit de la grève de l’Eglise, avec :

– un terre plein équipé d’un préau couvert, et d’un bras de manutention,
– une descente de quai,
– un chenal d’accès.

Les installations étudiées par le CEREMA sont évaluées à un montant extrêmement élevé, soit 11 millions d’euros.

Ce montant est totalement hors de portée budgétaire pour la commune et devra forcément être revu à la baisse.

Par ailleurs le commissaire enquêteur du PLU estime que ce projet est surdimensionné.

 

AVANTAGES INCONVÉNIENTS
 

–  Proximité des points de livraison pour le frais.

–  Présence de la STEP et présence d’un chemin de roulement utilisé depuis 2014

–  Il est démontré que le site est utilisable avec quelques aménagements

–  Possibilité de construire, à proximité, des installations pour recevoir le frais

–  Suppression de la mixité passagers et fret au Port Clos.

 

–   Situé dans une zone remarquable et très sensible en matière d’environnement

–   Risque avéré d’envasement

–   Coût des installations élevé. A revoir impérativement à la baisse.

–   Projet surdimensionné selon l’avis de la commissaire enquêteur.

–   Les livraisons dépendent des marées

–   Présence de nombreux riverains

 

Le Port Clos

C’est le port de Bréhat, géré par la Région. Il est utilisé depuis plusieurs décennies pour le débarquement des marchandises. Cette activité peut y être réalisée en toute légalité.

Cependant le problème central pour ce site c’est la mixité passagers et fret. Il y a évidemment un risque d’accident pour les voyageurs.

Cependant ce risque ne doit pas être surestimé. En prenant les dernières 50 ans de fonctionnement on compte moins de 5 accidents graves ce qui, statistiquement, est relativement faible au regard du nombre de voyageurs utilisant le port. De plus d’autres îles, comme l’île de Groix, font cohabiter les voyageurs et la gestion du fret.

La barge de la CCI au Port Clos
La barge de la CCI au Port Clos

Pour autant, il serait intéressant de séparer les uns des autres.

Un des projets de la Région est de mettre en place des cales flottantes suffisamment solides pour leur permettre de recevoir les marchandises de la barge et éviter ainsi l’utilisation des cales lorsque des voyageurs y sont présents. Ces cales flottantes seraient déchargées à marées basses. Ce système est en phase de test avec un ponton déjà en place. Même si le ponton actuel est trop léger pour être exploité durablement, le projet de la Région, plus conséquent et certainement plus adapté, améliorerait les conditions de récupération des marchandises.
L’installation de ces cales flottantes n’aurait pas d’impact important en matière d’environnement et leur coût serait pris en charge par la Région.
Cependant il ne règle pas le problème de la mixité passagers et fret car les tracteurs venant récupérer les marchandises y seraient nécessairement confrontés. Il serait d’ailleurs intéressant de réfléchir à une organisation qui limite au maximum la mixité fret passager. La distance relativement importante avec les points de livraisons doit également être soulignée.

Pour le frais il ne sera pas possible, vu la configuration des lieux, de créer des installations de stockage. L’utilisation de containers réfrigérés pour le frais positif et le frais négatif devra être prévue. Ces containers devront disposer d’une autonomie conséquente.

En terme d’environnement le site est peu sensible car déjà exploité comme port pour le déchargement des marchandises.

 

AVANTAGES

INCONVÉNIENTS

 

–  Port existant et fonctionnant depuis longtemps pour le déchargement des marchandises

–  Peu d’impact sur l’environnement vue son existence légale

–  Coût des installations de déchargement relativement faible et relevant du budget régional

–  Site situé dans la zone urbanisée du PLU

 

–   Mixité passagers et fret occasionnant des risques d’accident

–   Distance pour les livraisons de frais

–   Présence de nombreux riverains

–   Les livraisons dépendent des marées

–   Impossibilité de construire à proximité des installations pour recevoir le frais

 

La Corderie

Ce site n’a jamais été utilisé pour le déchargement des marchandises. Il a, en revanche, permis l’évacuation de certains déchets.
Dans la logique municipale actuelle, la Corderie devrait devenir le site exclusif pour l’évacuation de l’ensemble des déchets. Une installation de compactage des ordures ménagères est prévue à proximité
Aujourd’hui le site a été doté d’une cale qui a été construite par les employés communaux pendant l’automne 2018 sans aucune autorisation.

La plateforme récemment construite par les employés communaux
La plateforme récemment construite par les employés communaux.

Le préfet a été informé par courrier du 20 septembre 2018. Celui-ci, en réponse le 19 octobre 2018, a simplement « pris note » de cette implantation. Cela n’est pas une autorisation même provisoire. Dans le même courrier le préfet a demandé à la commune de mettre en œuvre les procédures d’autorisation idoines.

En effet, en terme d’environnement, c’est un site, qui est classé comme remarquable par le PLU, est extrêmement sensible. C’est le cas pour la Corderie en elle-même, en matière de biodiversité et de paysage remarquable.

Le risque d’envasement devrait être étudié.

En revanche le site de Chicago, qui a été utilisé comme décharge d’ordures en tout genre pendant plusieurs décennies, est un endroit extrêmement pollué.
Si cela limite, l’impact global en matière d’environnement, peu de travaux sont possibles car ils supposeraient la dépollution du site qui coûterait certainement une fortune.

Au-delà de cet aspect juridique le déchargement des marchandises nous semble possible même si la configuration des lieux le rend compliqué. Il n’existe pas de véritable plateforme sauf celle qui a été construite rapidement et illégalement en automne dernier. Le débarquement est également lié aux marées.

Notons quand même que la circulation des barges devant deux plages et à travers un mouillage encombré en été nous parait dangereuse.
De même aucune construction ne peut être envisagée à proximité pour recevoir le frais. L’utilisation de ce site, éventuellement doublé, avec celui de la grève de l’église permettrait de supprimer la mixité passagers et fret au Port Clos.

 

AVANTAGES

INCONVÉNIENTS

 

–   Site qui fonctionne pour l’évacuation de certains déchets.

–   Présence du site de Chicago qui, par sa pollution, réduit l’impact environnemental.

–  Présence d’un chemin de roulement même s’il est fragile et, pour l’instant, non légal

–  Suppression de la mixité passagers et fret au Port Clos

 

–   Situé dans une zone remarquable et très sensible en matière d’environnement

–   Risque d’envasement à étudier

–   Impossibilité de faire de gros travaux

–   Impossibilité de construire à proximité des installations pour recevoir le frais.

–   Distance pour les livraisons de frais

–   Les livraisons dépendent des marées

–   Présence de nombreux riverains

 

Goaréva, l’ancien canot de sauvetage

Même s’il a été exclu par le rapport Techmar, en discutant avec les marins, ce site, que nous appellerons le Goareva, est leur premier choix. La motivation est simple. Ici le déchargement des marchandises s’affranchit des marées car il est accessible qu’elles soient hautes ou basses.
C’est un élément extrêmement intéressant à prendre en considération car il s’agit du seul site dans cette situation. Il permet de prévoir une organisation plus souple du transport de marchandises en réorganisant le lieu de collecte sur le continent.
Un autre élément non négligeable doit également être pris en considération, c’est l’existence du bâtiment qui abritait le canot. Même s’il se dégrade, celui-ci pourrait facilement être transformé en lieu de stockage des produits frais. Mais le statut juridique de ce bâtiment reste assez incertain. Pour autant il faudrait prévoir un certain nombre de travaux pour créer une plateforme pour que les tracteurs puissent manœuvrer facilement.
L’utilisation de ce site pour le débarquement de l’ensemble des marchandises permettrait de réserver le Port Clos aux seuls voyageurs. Un des avantages importants est aussi l’absence de riverain si ce n’est la proximité d’une seule maison.

Le bâtiment de l’ancien canot de sauvetage.
Le bâtiment de l’ancien canot de sauvetage

Cependant le Goareva présente des inconvénients assez importants. Il est situé dans une zone extrêmement protégée et il est très sensible en termes d’environnement.

Il n’a jamais été vraiment testé alors que les autres sites ont tous plus ou moins fonctionné. Par ailleurs c’est un site excentré et qui demanderait une réflexion précise sur le transport terrestre des marchandises sur l’île. Le chemin qui y mène est également très fragile et devra être consolidé. Cela risque d’augmenter sensiblement le coût.

Enfin il faut savoir que la propriété d’une partie du chemin échappe à la commune. De nombreux propriétaires sont concernés. Cela demanderait de longues négociations avec chacun d’eux pour acquérir les lopins de terre concernés et aurait nécessairement un coût.

Le chemin d’accès
Le chemin d’accès

Derniers inconvénients, c’est un site prisé par les baigneurs du camping ou les bréhatins et un projet aquacole de ferme piscicole existe porté par les agriculteurs.

 

AVANTAGES

INCONVÉNIENTS

 

–   Accès par toutes marées pour les livraisons

–   Présence d’un bâtiment facilement transformable pour recevoir les produits frais

–   Un seul riverain

–   Le site est utilisable avec quelques aménagements

–   Suppression de la mixité passagers et fret au Port Clos

 

–   Site dans une zone remarquable très protégée et très sensible en matière d’environnement.

–   Site qui est éloigné du Bourg. Obligation de repenser la circulation terrestre sur l’île.

–   Chemin d’accès fragile qui devra être conforté

–   Chemin d’accès appartenant à de nombreux propriétaires

–   Site prisé de baignade et projet agricole