L’agriculture sur notre île suscite un débat intense et fertile. Il s’agit d’une équation complexe qui se fonde sur des arguments patrimoniaux, écologiques et sociologiques.
Le vendredi 18 août 2017, à l’initiative de Fert’ile, un débat a permis une réflexion d’actualité, pour tous ceux qui se sentent concernés par plusieurs équilibres :
– se nourrir sainement et localement en bénéficiant d’une terre exceptionnellement fertile, qui certes favorise de magnifiques jardins mais qui comporte des zones retournées aux friches ;
– préserver l’accès à un espace vital naturel, cantonner l’expansion d’un paysage périurbain qui défigurerait la partie terrestre du patrimoine paysager de l’archipel, et ce en période de rédaction du projet d’aménagement et de développement durables (PADD) qui donne les orientations du plan local d’urbanisme (PLU) ;
– agréger une part de population active sur le secteur agricole avec des pratiques nouvelles, valorisantes pour qui souhaite vivre près de la nature, permettant de diversifier les emplois offerts par le microcosme îlien, afin de remédier à la saisonnalité du tourisme ;
– concilier une réalité foncière spéculative avec un partage souhaitable de l’exploitation raisonnée de ce trésor de 350 hectares que constitue Bréhat…
Le débat a pris la forme de témoignages, sur les moyens de préserver, consolider et accroître le potentiel agricole de Bréhat. Les interventions et les questions posées ont reflété l’intérêt suscité, certaines difficultés à lever, et ont fourni des arguments intéressants.
On peut les classer en trois types :
– Les arguments patrimoniaux : il y a un siècle, 2000 habitants vivaient sur une agriculture vivrière très morcelée, qui explique le cadastre et les héritages disparates dont disposent certaines familles. C’est un paysage à faire revivre, de bocage avec ses murets, mais en s’adaptant à une exploitation rationnelle et surtout permettant un revenu compatible avec le niveau de vie actuel.
– Les arguments écologiques : une terre très fertile, avec un climat exceptionnel, qui peut apporter des produits de grande qualité, avec une exploitation biologique et raisonnée, pour fournir une part de l’alimentation nécessaire à la population de l’île (résidente ou en visite même à la journée), qu’il s’agisse du maraichage, de produits à haute valeur ajoutée (plantes aromatiques ou médicinales), de l’élevage pour le lait/ produits transformés et la viande, et le retour d’une activité traditionnelle mais originale, l’exploitation des algues.
– Les arguments sociologiques : la diversification des activités économiques, de manière à constituer un tissu social rajeuni malgré les contraintes de la pression foncière, afin de garder l’équilibre qui fait société, d’autant plus prégnant sur un microcosme de 350 hectares. Il s’agit par conséquent d’un projet d’aménagement et de conciliation de l’avenir, entre les habitants de Bréhat.
C’est donc une équation complexe à résoudre, d’où la nécessité d’une analyse précise des potentiels et des modes d’aménagement, d’investissement, de mise à disposition du foncier et de sa valorisation. C’est l’objet de cette étude. En effet, s’il peut exister des initiatives individuelles allant dans la direction escomptée, il sera difficile, sans des argumentaires fondés et précis de lever les difficultés déjà évoquées lors des différentes réunions et discussions sur ce sujet.
Par Yann-Hervé De Roeck